L’HVG est définie par une augmentation de masse du ventricule gauche (VG). Elle peut être la résultante d’une augmentation de l’épaisseur du myocarde (HVG concentrique) ou de son diamètre (HVG excentrique). Elle s’observe au cours de nombreuses pathologies liées, le plus souvent, à une augmentation du travail du cœur: hypertension artérielle, valvulopathie, cardiomyopathie hypertrophique, cardiopathie ischémique, adaptation au sport…. ou à une autre cause (ex. : fibrose, amylose, nécrose…).
Physiopathologie
Le paradigme classique du diagnostic ECG postule que l’augmentation de la masse ventriculaire gauche active génère un champ électrique plus fort, vers la gauche et l’arrière et que le voltage se traduit par une amplitude accrue des QRS dans les dérivations correspondantes.
De facto, le diagnostic ECG de l’HVG repose principalement sur les critères de voltage des QRS, c’est-à-dire d’amplitude accrue des complexes QRS dans des dérivations gauches et postérieures (cf. Indices d’HVG). Il est renforcé par la présence de signes associés, lesquels trahissent parfois à eux seuls l’existence d’une HVG (AHA 2009 [1]). Tous ces signes peuvent manquer dans les cas d’HVG non liés à une augmentation de la masse musculaire active.
Les indices d’HVG directs, basés sur le voltage des QRS sont spécifiques (≥ 90%), mais en moyenne peu sensibles (≤ 30%), comparés aux méthodes modernes d’imagerie [2]. Cette sensibilité médiocre s’explique par le fait que la masse augmentée du VG ne produit pas forcément une activité électrique accrue en raison d’une fibrose, d’une pathologie de surcharge ou d’une ischémie (ex. séquelle d’infarctus, cardiomyopathie, amylose) ou d’une difficulté à l’enregistrer (théorie de l’angle solide, malposition des électrodes, bloc de branche, tracé hyper-filtré…). Néanmoins, l’ECG garde sa place compte tenu de sa disponibilité, de son coût et des renseignements pronostics indépendants qu’il procure.
Vidéo cours 5 (50 min). Hypertrophie-ventriculaire-gauche-ou-droite
Diagnostic ECG
Indices directs : voltage des QRS [1]
L’amplitude des ondes R est ample en V5-V6 et/ou DI-VL avec les es ondes S amples en V1-V2(V3-V4) ou DIII-VF.
- Les indices les plus utilisés sont l’indice de Sokolow et l’indice de Cornell et RVL > 11 mm (2e critère de Sokolow)
- L’indice de Murphy (avec SV2) complète bien le Sokolow et l’indice de Peguero (avec SV4) complète bien le Cornell.
- Les voltages de QRS en dérivations frontales sont importants en particulier dans la dérivation VL (HVG suspecte si > 11 mm) ou DI (intégrés dans les indices de Lewis et celui de Indice de Gubner-Ungerleider.
- L’intelligence artificielle est au moins aussi performante que ces indices (2021 [14]).
Signes associés
- Des anomalies de repolarisation ventriculaire (Cf. Surcharge ventriculaire gauche ou “strain pattern“) sont généralement associées aux anomalies précédentes. Elles sont parfois les seules témoins d’une HVG sévère.
- Les complexes QRS élargis (110-120 ms) voire larges (≥ 120 ms). La double anomalie (QRS amples et QRS élargis) est très en faveur d’une HVG, en l’absence de bloc de branche gauche incomplet (Cf. Bloc de branche incomplet gauche). D’autres anomalies sont possibles comme un retard à l’inscription de l’onde R en V6 (retard à la déflexion intrinsécoïde), une disparition de l’onde q septale ou des complexes QRS fragmentés.
- L’axe des QRS peut être dévié vers la gauche avec parfois un bloc fasciculaire antérieur gauche (lévorotation ou rotation horaire sur l’axe longitudinal avec axe du cœur entre 0 et -90°). La zone de transition des QRS en dérivations précordiales peut être déviée vers la gauche.
- Une hypertrophie atriale gauche est possible, secondaire à l’altération de la fonction diastolique du VG.
La suspicion d’hypertrophie VG repose sur la positivité d’au moins un indice d’hypertrophie ventriculaire. Ces indices ont une excellente spécificité (voisine de 90%), mais une sensibilité médiocre (voisine de 25-30%) comparée à l’échocardiographie [1]. Ils sont :
- moins sensibles chez la femme [5][6], avec un âge avancé (≥ 60 ans) ou une obésité [6][7],
- moins sensibles lorsque la masse ventriculaire est augmentée par de la fibrose, amylose, sarcoïdose…. ou lorsqu’il coexiste une HVD associée (cf. Hypertrophie biventriculaire).
- moins spécifiques chez l’homme jeune sain (plutôt sportif ou origine africaine) : QRS hypervoltés banals
Leur présence aggrave en général le pronostic vital des sujets hypertendus [8] ou atteints de valvulopathie [9].
En pratique
L’hypothèse d’une hypertrophie VG doit être formulée en présence d’un seul indice d’HVG (en exigeant une amplitude adaptée à l’âge et au sexe), mais elle sera renforcée en présence de plusieurs indices directs d’amplitude des QRS (monodérivation ou combinés) et/ou autres indices indirects (l’axe du cœur, la durée des QRS, une hypertrophie atriale gauche ou une repolarisation évocatrice de surcharge ventriculaire) [4].
Diagnostics différentiels
- Variante ECG normal. Complexes QRS amples du sujet jeune masculin (plutôt sportif ou origine africaine) : ≥ 20 mm en dérivations frontales ou ≥ 45 ms en V3 ou V4
- Bloc incomplet gauche. Le diagnostic différentiel est quasi impossible sur l’ECG.
- Bloc de branche gauche, mais dans ce cas le pic de l’onde R est crocheté (RR’) ou empâté dans au moins deux dérivations latérales, l’onde q est absente en V5-V5(DI) et les QRS sont larges > 120-140 ms (voir ici). Il est néanmoins possible de faire le diagnostic d’HVG en cas de BBG ou HVG en cas de BBD
Valeur pronostique de l’ECG
Le diagnostic électrique d’HVG possède une valeur pronostique indépendante de l’échocardiographie sur la survenue d’accident cardiovasculaire [3][4][10][11][12]. Il semble que ces deux entités soient différentes, mais reliées par des conditions physiopathologiques similaires.
Certaines formes d’HVG particulièrement sévères (insuffisance aortique, cardiomyopathie hypertrophique) s’accompagnent d’ondes q de pseudo nécrose au niveau des dérivations où R est proéminente. D’autres formes d’HVG avec dilatation VG (par ex. insuffisance mitrale, insuffisance aortique, persistance du canal artériel), peuvent s’accompagner d’une onde RV6 > RV5 et d’anomalies de repolarisation inhabituelles comme une onde T positive, ample et symétrique telle que TV6 > TV5 [13].
L’association d’un BBG à une HVG aggrave le pronostic des patients (cf. HVG et bloc de branche) [3].
Vidéo YouTube. Diagnostic ECG de l’hypertrophie VG (24 min).
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