La permutation des électrodes des membres ou des électrodes précordiales est fréquente (jusqu’à 4 % des ECG [1][9]). La malposition est encore plus fréquente puisqu’on estime que les électrodes V1 et V2 sont placées trop haut dans presque la moitié des ECG (cf. Electrodes V1V2 trop hautes).
Cette erreur de technique compromet l’interprétation, soit parce que les dérivations n’explorent plus exactement la région souhaitée (erreur dans les mesures d’indices d’hypertrophie, dans l’analyse du segment ST…), soit parce qu’elles génèrent de fausses anomalies (fausses ondes Q, repolarisation Brugada, erreur d’axe du cœur…) [1][2][3][4].
Comme disent les auteurs de cette mise au point en 2003 “Malposition poses a non-negligible risk of creating panic and confusion at the bedside in daily clinical practice” (cf. [9] et autres réf [10]).
L’inversion des électrodes des membres
Elle est fréquente. Elle doit être suspectée devant l’existence d’un des trois signes suivants :
- a) en DI : une onde P inversée suivie par un QRS-T négatif (≠ QRS-T positif en V6) ;
- b) en DI, DII ou DIII : une dérivation plate avec des QRS microscopiques ;
- c) en DIII : un P-QRS-T tout négatif.
Toute lecture d’ECG doit commencer par rechercher une inversion d’électrodes (cf. ECG. lecture et synthèse).
L’erreur la plus fréquente est l’inversion droite/gauche des électrodes des membres. L’inversion membre supérieur gauche et membre inférieur gauche est très difficile à détecter (inversion BG et JG). L’inversion des membres inférieurs est impossible à détecter (voir ci-dessous). Des critères permettent de deviner quelles électrodes ont permuté [3].
L’inversion de coté des électrodes des membres supérieurs ou des quatre membres est la plus fréquente et la plus facile à repérer. Elle est détectée par l’existence d’une onde P DI inversée. Le P-QRS-T DI est généralement négatif et ne ressemble pas au QRS-T V6. DII et DIII sont inversées et donc VF reste inchangée (car la rotation des deux poignets conserve l’axe de symétrie). De plus, les polarités des QRS en VR et VL sont souvent inversées (car VR et VL ont permuté) [6].
L’inversion des électrodes membre supérieur droit (poignet droit ou PD) et membre inférieur gauche (jambe gauche ou JG) est détectée par l’existence d’un P-QRS-T tout inversé en DII (car DII est sur l’axe de PD et JG). Comme la rotation se fait autour de l’axe de symétrie de VL (perpendiculaire à DII), VL reste inchangée; DI et DIII permutent et sont inversées; VR et VF permutent.
L’inversion des électrodes du membre supérieur gauche (PG) avec membre inférieur gauche (JG) modifie peu l’axe des ondes P et des QRS. Elle est souvent indétectable, par l’homme comme par les algorithmes [5]. Un aspect tout négatif de DIII (P-QRS-T) est évocateur, mais peu spécifique. L’existence d’une onde P DI plus ample que P DII renforce cette hypothèse. En effet, les dérivations DI et DII et les dérivations VF et VL sont interchangées, la dérivation VR reste inchangée (Cf. Inversion BG et JG).
L’inversion des électrodes membre supérieur gauche ou membre supérieur droit avec le membre inférieur droit se traduit par la nullité de la dérivation DIII ou DII respectivement.
La double inversion membres supérieurs (poignets) et membres inférieurs (jambes) de chaque côté se traduit par la nullité de la dérivation DI.
La triple inversion par rotation “en manège” des électrodes (PG avec PD, PD avec JD, JD avec PG) entraine DI = DIII; DII = – DI; DIII = – DII; aVR = aVL; aVL = aVF; aVF = aVR. Voici un beau cas clinique de Carrousel [7].
L’inversion des électrodes des membre inférieurs entre elles n’a pas de traduction sur l’ECG, car la translation à droite de l’électrode de jambe gauche ne modifie pas suffisamment le triangle d’Einthoven et la position sur le corps de l’électrode de jambe droite n’a aucune importance (elle sert de “relai à la terre”). Cette inversion est fréquemment associée avec l’inversion des électrodes de poignet (gauche versus droite).
En revanche, l’inversion de l’électrode du membre inférieur droit avec une électrode des membres supérieurs se traduit par une dérivation D1, D2 ou D3, plate en raison de l’affinement du triangle d’Einthoven. Exemple ci-dessous. D3 plate.
En fibrillation atriale le diagnostic peut être difficile, car il n’y a pas d’ondes P négatives en DI pour nous alarmer. D’où l’importance de vérifier les 12 règles de l’ECG normal, et en particulier que les QRS en DI ressemblent à ceux de V6 et que ceux de VR ressemblent à V1 (Cf. Quiz amusant [8], Quiz apprentissage par l’erreur).
L’inversion des électrodes précordiales
Elle peut être détectée par l’absence de progression harmonieuse des ondes R de V1 à V4(V5) ou n’importe quelle dysharmonie dans l’évolution des QRS de V1 à V6.
Certains algorithmes d’interprétation (en série sur certains appareils) peuvent détecter les inversions les plus typiques (côté gauche côté droit) voire des inversions de progression des électrodes précordiales.
Une aide au repérage du mauvais positionnement des électrodes par les algorithmes d’interprétation ou “machine learning” est possible [5]
Pour tout comprendre (en anglais), lire ci-dessous et sur le site web de life in the fast lane [6] ou le PDF 2023 [9].
Quiz : Combien d’électrodes sont inversées ?
Réponse dans quiz technique et pièges niveau 2
Malposition des électrodes V1V2
voir Electrodes V1V2 trop hautes
Faîtes des quiz sur le site web (plusieurs niveaux de connaissance 1 à 3). Exemple Quiz Technique et pièges
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